Avertissement aux amateurs de copier-coller et aux gardiens de l'orthodoxie
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Ces notes ont pour but d’aider à la lecture de l’ouvrage ; elles ne sauraient donc se substituer à celle-ci.
Les lettres (a., b., c.) signalent un alinéa.

EMMANUEL KANT
CRITIQUE DE LA RAISON PURE

Notes de lecture
A partir de la traduction d’Alain Renaut, GF-Flammarion

INTRODUCTION


I. De la différence entre la connaissance pure et la connaissance empirique
-93-
a. Toute notre connaissance commence avec l’expérience.
b. Il n’en résulte pas que notre connaissance dérive en totalité de l’expérience.
c. Si l’on parvient à montrer qu’il existe des connaissances qui ne dérivent pas de l’expérience, on les nommera connaissances a priori.
-94-
a. Discussion : On appelle couramment a priori une connaissance qui découle de l’expérience mais pas directement. Par exemple, celui qui mine les fondements de sa maison peut savoir a priori qu’elle s’écroulera.
b. Dans cet ouvrage, nous réserverons le terme de connaissances a priori aux connaissances absolument indépendantes de toute expérience. Les connaissances pures forment un sous-ensemble des connaissances a priori. Rien d’empirique n’est mêlé à une connaissance pure.

II. Nous sommes en possession de certaines connaissances a priori, et même l’entendement commun n’est jamais sans posséder de telles connaissances.
c. Le critère pour distinguer une connaissance pure d’une connaissance empirique.
Est a priori une proposition dont la pensée inclut la nécessité. Cette proposition doit être rigoureusement universelle : aucune exception possible.
-95, 96-
a. Exemples puis démonstration de l’existence de purs jugements  et de purs concepts a priori.
- dans les sciences : les propositions mathématiques ;
- dans l’usage de l’entendement, par exemple, la proposition  « Tout changement doit avoir une cause »;
- les concepts d’espace et de substance.

III. La philosophie requiert une science qui détermine la possibilité, les principes et l’étendue de toutes les connaissances a priori
-97-
a. Ce qui frappe, ce n’est pas la rareté des connaissance a priori, mais au contraire leur surabondance. On se donne le droit d’affirmer des quantités de choses indépendamment de toute expérience (abandonnant le domaine de toutes les expériences possibles), donc a priori.
b. Kant parle ici de la métaphysique dogmatique qui traite allégrement de Dieu, de la liberté, de l’immortalité.
Un champ au-delà du monde sensible dans lequel la raison n’est pas bornée par l’expérience.
-98-
a. Ce paragraphe est vraiment long. Je le scinde en trois parties :
a1. (jusqu’à « … pourraient être de nature tout à fait différente. », 15e ligne avant la fin)

Un foisonnement de connaissances et de principes dont on ne connaît pas l’origine.
Comment l’entendement peut-il parvenir à toutes ces connaissances a priori ?
Les mathématiques ont réussi à fonder leurs propres affirmations ; pourquoi pas la métaphysique ?
-99, 100-
a2. (jusqu’à « … d’un tel examen tardif et dangereux. », milieu de la page 99)
Kant dénonce l’ivresse du discours dogmatique qui se construit à l’abri de toute réfutation possible par l’expérience.
Il semble distinguer la raison qui articule les concepts et peut juger de leurs fondements, de l’entendement qui s’applique à la compréhension des phénomènes dans l’expérience. Mais la distinction est loin d’être systématique.
Exemples de la colombe qui aspire à voler dans le vide et de Platon qui erre dans l’espace vide de l’entendement pur.

a3 (jusqu’à la fin)
Qu’est-ce qui fait que les édifices de la raison dogmatique sont si fragiles ?
La raison procède le plus souvent de façon analytique. Elle enchaîne les concepts à partir de l’analyse de concepts existants, ce qui n’élargit par vraiment le champ de nos connaissances.

IV De la différence des jugements analytiques et des jugements synthétiques
-100-
Un jugement lie un prédicat B à un sujet A.
Kant distingue deux types de jugements :
- le jugement analytique
Le prédicat B ne fait que rendre explicite quelque chose qui fait partie du sujet A. Le prédicat n’ajoute rien au concept du sujet. Développer A, c’est penser B.  Exemple : Tous les corps sont étendus.
- le jugement synthétique
Le prédicat B n’est pas inclus dans le sujet A, bien que le jugement établisse un lien de nécessité entre les deux. Développer A ne conduit pas à B. B ajoute quelque chose au contenu de A. Exemple : Tous les corps sont pesants.
-101-
a. Les jugements d’expérience sont tous synthétiques (a posteriori).
Si ce n’était pas le cas, l’expérience serait inutile, puisque la simple pensée de A poserait B comme nécessaire.
L’expérience trouve ici sa définition : elle effectue la liaison synthétique des intuitions. Elle démontre le lien entre deux concepts dont aucun n’est inclus dans l’autre.
-102,103-
b. Peut-on parler de jugements synthétiques a priori ?
Dans ce cas, le lien nécessaire entre A et B ne peut pas être démontré dans l’expérience. Sur quoi s’appuyer pour l’établir ?
Exemple : Tout ce qui arrive possède une cause.
L’analyse du concept « quelque chose qui arrive » ne peut pas donner le concept de cause. Il faut établir et fonder le lien de nécessité entre ces deux concepts.
Sur quoi l’entendement se fonde-t-il ? Quel est l’équivalent de l’expérience (garantie des jugements synthétiques a posteriori) pour les jugements synthétiques a priori ?
La question est ici seulement posée.
+ A ce stade, il faut bien saisir l’enjeu :
- Pourquoi Kant s’intéresse-t-il tellement aux jugements synthétiques a priori ?
Il  s’interroge sur la possibilité même de la philosophie et sur la consistance du discours de celle-ci. En particulier : La métaphysique est-elle possible ? Sur quoi se fonde-t-elle ? Jusqu’où peut-elle aller ?
Or, les propositions de la métaphysique sont des propositions a priori (formulées indépendamment de l’expérience), et des propositions synthétiques (elles ajoutent à leur sujets des déterminations qui n’y figuraient pas au départ ; en d’autres termes, de proposition en proposition, le champ des connaissances s’étend).
Donc, la question de la métaphysique dépend de celle de l’existence et de la consistance des propositions synthétiques a priori. +
-103-
V. Dans toutes les sciences théoriques de la raison sont contenus des jugements synthétiques a priori faisant fonction de principes

Ce point V. est divisé en trois parties numérotées 1, 2, 3.
1. (Mathématique et géométrie)
a. Les jugements mathématiques sont tous synthétiques. Kant pense être le premier à le noter.
L’erreur a été de croire que puisque toutes les propositions des mathématiques obéissent nécessairement au principe de contradiction (critère d’apodicticité, de vérification après coup), elles soient produites au moyen de ce principe.
En elle-même, une proposition synthétique ne peut pas être saisie d’après le principe de contradiction.
-104-
a. Les propositions de la mathématique pure sont toujours des jugements a priori.

b. 7 +  5 = 12 
Une propositions synthétique a priori, selon Kant. (Certains logiciens, dont Frege, ne sont pas du tout d’accord avec ça.) On peut critiquer cet exemple, mais attention, ce serait passer à côté de ce que Kant veut expliquer : la manière dont se construit un jugement synthétique a priori, la manière dont s’effectue la synthèse.
Celle-ci s’opère par le moyen de l’intuition.
En effet, le passage de A à la proposition A=>B (en math. la découverte de la démonstration) s’opère à l’aide d’une intuition.
En quoi consiste-t-elle ?
Partant du nombre 7, je songe à décomposer 5 en unités en m’appuyant sur l’intuition que 5 est une somme d’unités. J’ajoute ces unités une à une et j’aboutis à 12.
+Cet exemple me semble vraiment mal choisi. Poser 7+5, c’est supposer défini le concept de somme. Or, ce concept ne découle-t-il pas lui-même de l’idée que tout nombre entier est une somme d’unités ? la somme de deux sommes d’unités est une somme d’unités, donc un nombre, que nous appellerons ici 12.+
Sans nous attarder sur cet exemple, retenons seulement que la synthèse, c’est à dire le lien constitutif de la proposition (dont l’apodicticité sera établie après coup grâce au principe de contradiction), est établie à l’aide d’une intuition.
-105-
a. Les axiomes de la géométrie pure sont des poropositions synthétique a priori.
+Kant passe ici des propositions quelconques des mathématiques pures à un type de proposition tout à fait particulier : les axiomes. Il faut noter qu’une proposition quelconque est toujours déduite d’une proposition antérieure ; ce n’est pas le cas des axiomes. Comment un axiome est-il pensé ?+

b. Curieusement, Kant ne va pas examiner en détail un axiome de la géométrie, mais deux principes logiques indispensables à la démonstration, deux propositions analytiques.
C’est pour montrer que même une proposition analytique suppose la mise en œuvre de l’intuition.
- Le tout est égal à lui-même ;
- Le tout est plus grand que sa partie.
D’abord, bien qu’analytiques ce sont des propositions, pas de simples concepts. Penser le concept « tout », ce n’est pas la même chose que penser la proposition « Le tout est égal à lui-même ». En fait, lorsque le concept est donné, le prédicat n’est pas automatiquement pensé.

2. (Axiomes de la physique théorique)
b. « Dans tous les changements du monde des corps, la quantité de la matière demeure inchangée. » et « Dans toutes communication du mouvement l’action et la réaction doivent nécessairement être toujours égales l’une à l’autre. » sont des propositions synthétiques pensées a priori et forment la partie pure de la science nature.
-106-
3. Qu’en est-il de la métaphysique ?
S’il y a une métaphysique rigoureuse, scientifique, elle doit comporter des axiomes, c’est-à-dire des connaissances synthétiques a priori.
-106-
VI. Problème général de la raison pure
+L’enjeu signalé plus haut, Kant le formule ici explicitement.+

b. Le véritable problème de la raison sera contenu dans la question : Comment des jugements synthétiques a priori sont-ils possibles ?
-107-
Les graves défauts de la métaphysique (incertitude et contradiction) ont deux causes :
- On n’a pas conçu la différence entre jugement analytique et jugement synthétique ;
- On n’a pas réussi à poser le problème de la possibilité des jugements synthétiques a priori.
La possibilité ou l’impossibilité de la métaphysique dépendent de la réponse à cette question.
Hume conclut clairement à son impossibilité, mais Kant lui reproche un empirisme qui rend impossibles la mathématique et la physique pures.

c. De la solution du problème de la possibilité des jugements synthétiques a priori découlent :
- la possibilité ou non de l’usage pur de la raison ;
- la possibilité ou non d’une mathématique et d’une physique pures.

d. Mais ces sciences existent, puisqu’elles sont effectivement données. Pour la métaphysique, en revanche, on peut douter qu’elle ait jamais existé.
-108-
a. Pourtant, nous éprouvons une disposition naturelle pour la métaphysique.

b. Mais cela ne suffit pas à fonder une métaphysique rigoureuse.
Ce qu’il faut établir avec certitude, c’est si elle peut ou non atteindre à un savoir des objets qu’elle se donne.
On bien on donne à la raison pure un champ qui puisse s’étendre, ou bien on lui impose des bornes déterminées et sûres.
D’où cette reformulation de la question : Comment la métaphysique est-elle possible en tant que science ?
-109-
a. Répondre à cette question, c’est procéder à la critique de la raison.
Deux possibilités :
- la critique de la raison qui aboutit à la science ;
- l’usage dogmatique de la raison qui conduit à un affrontement d’affirmations sans fondement et au scepticisme.

b. La critique de la raison est une science de faible ampleur. « … elle a affaire non à des objets de la raison dont la diversité est infinie, mais uniquement à elle-même, à des problèmes qui surgissent entièrement de son sein et qui lui sont proposés, non par la nature des choses qui sont différentes d’elle, mais par sa propre nature. »
c. Une métaphysique ne peut s’édifier par la voie analytique, par simple décomposition des concepts résidant a priori dans notre raison.
Pourquoi ?
Parce que ce qui importe n’est pas le contenu de ces concepts, mais la manière dont nous parvenons a priori à ces concepts.
-110-

VII. Idée et division d’une science particulière portant le nom de critique de la raison pure
+Le titre rend exactement compte du contenu de la subdivision.+

a. La raison pure contient les principes permettant de connaître quelque chose absolument a priori.
Suivent une série de propositions et de définitions :
- La raison est le pouvoir qui fournit les principes de la connaissance a priori.
- Organon de la raison pure : principes d’acquisition et d’établissement des connaissances pures a priori.
- En appliquant cet organon, on obtient un système de la raison pure.
- Propédeutique au système ou critique de la raison pure : science permettant d’apprécier la raison pure, ses sources, ses limites.
- Connaissance transcendantale : une connaissance qui s’occupe moins d’objets que de notre mode de connaissance des objets en tant que cette connaissance est possible a priori.
- Philosophie transcendantale : système des concepts ayant trait à la possibilité des connaissances a priori.
-111-
Le projet de Kant est plus limité que celui de la philosophie transcendantale. Il n’ira pas plus loin que ce qu’il faudra pour apercevoir dans toute leur étendue les principes de la synthèse a priori.
Il ne développera de la philosophie transcendantale que la partie visant à rectifier les connaissances, à fournir la pierre de touche de la valeur ou de l’absence de valeur de toutes les connaissances a priori.
Il s’agit uniquement du pouvoir de la raison pure lui-même.
-112-
La critique de la raison pure a pour tâche de tracer le plan de la philosophie transcendantale de façon architectonique, c’est-à-dire en partant de principes et en garantissant que toutes les pièces de l’édifice sont là.
-113, 114-
a. La philosophie transcendantale est une philosophie de la raison pure simplement spéculative et non pratique.  « Tout ce qui est pratique, en tant qu’il contient des mobiles, entretient une relation avec des sentiments qui relèvent de sources empiriques de la connaissance. »
b. Nous devons absolument prendre en compte le fait que les deux sources de la connaissance humaine sont la sensibilité, par laquelle des objets sont donnés, et l’entendement, par lequel les objets sont pensés.
La sensibilité doit contenir les représentations a priori qui constituent les conditions dans lesquelles des objets nous sont donnés.

CAFE-BABEL

Par Laurent Bauchau le Mercredi 11 novembre 2009 à 19:20
Bonjour,
Je relis la CRP et je recherche un interlocuteur pour pouvoir discuter et éprouver mes idées sur la pensée développée dans cet ouvrage.

Si intéressé...
Laurent
 

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